Le chèque syndical est présent dans la loi d’habilitation pour réformer le code du travail par ordonnances. On connaîtra donc prochainement les détails du dispositif finalement retenu par le gouvernement. Promesse de campagne qu’Emmanuel Macron partageait avec le candidat du Parti socialiste, Benoît Hamon, la mesure fait débat depuis maintenant vingt-sept ans. De quoi s’agit-il ? D’un mode de financement du syndicalisme testé à partir de 1990 chez Axa et adopté notamment par l’Union nationale des caisses de sécurité sociale ou les instituts de cancérologie.

Son principe est relativement simple : une fois par an, l’employeur donne aux salariés un bon de financement d’une valeur préétablie que les salariés peuvent remettre, s’ils le souhaitent, aux organisations syndicales représentatives de leur choix. A l’issue de la période de collecte, les organisations syndicales obtiennent de l’employeur un financement correspondant au nombre de chèques syndicaux qu’elles ont respectivement collectés. Ce dispositif original n’a pas d’équivalent international bien qu’il repose sur la même logique incitative que les quasi-marchés largement utilisés en Grande-Bretagne pour le financement de certains services publics. Une spécificité française qui se comprend bien si l’on rappelle que le syndicalisme français est, plus que tout autre, touché par le phénomène de «passager clandestin». Précisons que si la quasi-totalité des salariés français sont couverts par un accord syndical (via la négociation de branche notamment) ou par le paritarisme, seuls 8 % d’entre eux font le choix d’adhérer à un syndicat, ce qui pose, à l’évidence, un problème de financement et de légitimité.

De ce point de vue, le chèque syndical se présente comme un moyen de renforcer les syndicats dans l’entreprise en leur apportant des ressources financières, certes, mais aussi et surtout en développant la syndicalisation. Le chèque syndical permettrait en somme de légitimer les organisations syndicales et de consolider la négociation collective. Il y a donc une certaine cohérence dans la promotion de ce dispositif à l’heure de la décentralisation de la négociation collective.

Il serait toutefois trop rapide d’en faire une solution miracle à la faiblesse structurelle du syndicalisme français. De fait, les réactions ambiguës des acteurs montrent combien il est difficile d’en anticiper les effets. Tant du côté de ses défenseurs que de celui de ses opposants, peu ont une position clairement tranchée. «Fausse bonne idée» pour l’Association nationale des DRH, cela traduit bien le sentiment qui règne autour de cette mesure. Si le chèque syndical semble répondre astucieusement à la spécificité du syndicalisme français, les résultats qu’il a produits là où il est en place ne sont pas convaincants. C’est que l’on ne pense le chèque syndical qu’à partir de l’expérience AXA. Or un détour par l’histoire montre que le chèque syndical version AXA ne correspond qu’approximativement au projet de ses concepteurs. Il est donc nécessaire, avant de compter les pour et les contre, de comprendre combien les modalités du chèque syndical importent et de préciser ce dont on parle.